L’histoire de l’almanach

Ah, l’on sonne à la porte. Qui est-ce ? c’est le facteur !

Le facteur, un métier certes, mais avant tout une personne, et parfois même, un personnage. Celui qui passe chez vous, qui vous apporte les bonnes et les moins bonnes nouvelles, celui qui vous relie aux autres, avec le monde. Il a un visage, une voix, il vous connaît et vous le connaissez. A l’heure de la recherche du « lien social » de notre société, le facteur est un réseau social bienveillant à lui tout seul : il ne fait pas qu’apporter le courrier. L’idée de service est très présente, surtout en milieu rural ; son passage rythme la journée de personnes isolées. Il renseigne, il conseille, il prend des nouvelles, il devient alors « mon » facteur.

Ce lien fort que les Français entretiennent avec leur facteur est très ancien…

Très tôt, dès le XVIIIème siècle avec le service des Petites Postes des villes, le facteur, afin de renforcer sa relation privilégiée avec ses usagers, leur souhaite une bonne nouvelle année sous la forme d’un petit calendrier ou d’un almanach, très en vogue à l’époque, accompagné d’un compliment lu ou parfois même, chanté. Ceci en échange d’étrennes. En 1810, il prend le nom commun d’ « almanach des Postes ».

En 1830 s’installent les premières tournées de campagne qui assurent au début une distribution tous les deux jours, puis un passage quotidien. Ce service rural fera du facteur un personnage connu et important de la commune qu’il visite. Il lui permettra de perpétuer l’usage des étrennes en échange de calendriers dispensant une foule de renseignements divers, administratifs, mais aussi touchant le domaine du cycle de la nature. Ces informations, très utiles aux gens de la terre, vont finir de rendre populaire cet almanach et d’en faire son succès. Rendez-vous pris chaque fin d’année : chaque foyer ou presque aura son almanach fièrement accroché au mur de la cuisine, consulté quotidiennement.

Le voilà donc utile et précieux cet almanach, mais pourquoi pas, en plus, en faire un bel objet afin de le rendre encore plus attractif ? C’est ainsi qu’il va se parer au fil du temps d’illustrations et de dessins qui suivront l’actualité, les modes et les tendances. Le XXème siècle voyant la photographie émerger et s’installer comme art à part entière, petit à petit, les dessins seront abandonnés au profit de ces images argentiques, puis numériques.

Mais revenons en ce milieu du XIXème siècle, en 1854 exactement, où le contenu de notre almanach va se personnaliser et sa fabrication s’industrialiser sous l’impulsion de François Charles Oberthur. Lavigne le fera évoluer par la suite pour lui donner la forme qu’il possède encore aujourd’hui : un carton imprimé recto-verso, muni d’un cahier spécial enrichi d’informations relatives au département auquel il est destiné. L’almanach moderne est né !

De nos jours, ils sont quatre éditeurs à produire les almanachs du facteur. Il faut rappeler que la Poste n’entre en rien dans la fabrication de l’almanach, il s’agit d’une démarche toute personnelle de la part de nos 72 000 facteurs français : ils achètent avec leur propre argent les almanachs, puis les proposent à leurs usagers en fin d’année.

Rendez-vous ritualisé, pas de nouvelle année sans almanach du facteur. Il devient même un sujet de recherches : celui que l’on achète à la naissance de son enfant pour immortaliser cette date précieuse, celui que l’on s’amuse à chercher dans des brocantes ou chez des collectionneurs pour l’offrir à une personne aimée.

Le précieux courrier dans sa sacoche, le facteur parcourt ses kilomètres de tournée, qu’il pleuve, qu’il neige ou qu’il vente : ce métier de communication et de service, qui a su évoluer au fil des siècles, reste fidèle à ses usagers et à sa vocation première de relier les uns aux autres. L’arrivée de l’almanach, tradition française indétrônable et unique au monde, prouve chaque année l’attachement indéfectible qui lie le facteur à ses usagers.

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